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  GILDAS DE LA FOUCQUERIE :

  - Vous abondez dans mon sens quand je suggérais que vous puissiez être un mauvais écrivain, mauvais auteur serait d'ailleurs plus exact. Mais pourquoi cet entêtement quasi pathologique ? Pourquoi ne pas avoir renoncé ? Et pourquoi cet aveu cynique et rance de toute une vie fourvoyée dans l'échec ?

  FABRICE FUSAING :

  - Mais c'est que j'ai toujours l'espoir que ma démarche exigeante finira par trouver un écho en in-quarto ! Il est difficile pour un homme d'admettre son échec et d'en deviser avec autrui. Mais il est encore plus difficile de vivre avec au quotidien. Le sentiment d'échec, tel un poison, se répand en vous lentement, méticuleusement, en provoquant une cénesthésie douloureuse. Il ronge votre énergie, votre enthousiasme, votre santé. Il écaille votre intégrité. Il vous fait perdre confiance et vous pousse à la réclusion car vous ne supportez plus le regard des autres en lequel vous croyez lire votre échec. Mais voyez-vous, ce terrible sentiment ne m'a pas complètement dévasté puisque je continue...
  "Je suis un artiste qui, dans la confidentialité la plus absolue, élabore une œuvre composée par des milliers de pages au creux desquelles il finira par s'allonger, un soir de grande fatigue, avec une cigarette et une boîte d'allumettes. J'aime tant le craquement sec de la petite boule rouge qui s'embrase dans l'instant et diffuse l'odeur âcre et lourde du soufre que je hume, avec gourmandise, avant d'allumer la cigarette qui s'impatiente au bout de mes lèvres nerveuses et dont mes doigts appellent l'amicale et tiède présence. Il me semble qu'il me sera doux de mourir ainsi, dans l'inflammation fulgurante et définitive de mon œuvre.

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