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"Sa beauté d'adolescent
perpétuel, qu'il conserva jusque dans la mort (ceux qui
meurent jeunes sont aimés des dieux), le blond cendré
de ses cheveux, la lumière qui se dégageait sans
cesse de ses yeux rieurs ne pouvaient pas ne pas retenir l'attention.
René à lui seul était spectacle, le rythme
de son pas avait je ne sais quoi d'une danse. Il ne paraissait
pas peser sur la terre qu'il effleurait, comme s'il eût
lévité. Sa taille fine, ses épaules et ses
hanches avantageuses alliaient la force à la grâce.
La découpure de sa silhouette sur les photographies que
l'on garde de lui, prises au bord de la mer avec d'autres garçons
nus, est unique. On ne peut le comparer à aucun autre.
Son élan faisait penser à celui d'un jeune cheval
et son sourire évoquait la grimace des cavaliers de l'Acropole
dont la fougue accentue l'angoisse."
Marcel Jouhandeau
Préface à "L'Esprit contre la raison"
Editions Tchou (1969)