Presque trente
ans d'écriture dans l'anonymat pour ainsi dire absolu.
Ténacité ? Entêtement ? Stupidité ?
Fatalité ? Syndrome du génie ou de l'artiste maudit
? Allez ! Rien de tout cela. Ou un peu de tout peut-être...
Fasciné par Jacques Brel, bouleversé par
Léo Ferré, enchanté par Jacques Bertin, je
me suis lancé bien jeune sur leur trace et il ne sera pas
difficile au lecteur de constater leur influence sur mon écriture.
C'était en 1970. J'avais vingt ans et un public, en province.
Après quelques années de succès local, on
n'échappe pas à l'attirance de Paris où tout
se fait et se défait. Et là, le bide. Mais des rencontres.
Et d'autres formes d'expression artistique. La nouvelle, le roman,
le scénario, la pièce de théâtre...
Ah ! Ce besoin incoercible d'inventer, de fabriquer, de pétrir, de fourbir... Mais que d'échecs pour quelques succès ! Et qu'il est difficile d'être artiste en cette fin de siècle ! Combien sont-ils, ceux qui parviennent à (sur)vivre de leur art ? Être artiste aujourd'hui, c'est un peu comme au loto : ou tu as les six bons numéros ou tu vas jouer ailleurs ! Il suffit de le savoir. Le problème avec la vie, c'est qu'elle ne fournit pas le mode d'emploi et qu'il vaut mieux faire le bon choix tout de suite.
Moi, j'ai choisi. J'ai choisi d'être un artiste, même inconnu. Parce que je ne sais pas vivre autrement. Je suis libre. J'écris et fais ce que j'ai envie de faire. Sans concession. Je n'aime pas répéter les mêmes choses, m'installer dans un style. C'est pourquoi, envers et contre tous et toutes règles, j'évolue comme bon me semble sur une gamme étendue qui va de la chanson au cinéma en passant par le théâtre, la bande dessinée, les collages...
J'ai choisi, disais-je.
Aussi, je me refuse à l'aigreur et à la rancur
envers la société puisque j'ai toujours été
conscient que mon choix allait m'entraîner dans une vie
difficile. La société n'aime pas les atypiques,
les autodidactes, les marginaux. Elle n'aime pas les artistes,
sauf quand ils ont "réussi". Je m'en rends compte
lorsque "les fins de mois qui reviennent sept fois par semaine"
m'obligent à prendre des jobs... Pourtant, ô paradoxe
!, la société me tend toujours les bras pour me
récupérer. Je tiens bon dans la marge. Tout près
de la frontière. Jusqu'à quand ? C'est que parfois,
le découragement est grand. Alors je fixe des bornes. Je
me dis, s'il ne se passe rien cette année, je décroche.
Mais pour faire quoi ? Je n'ai jamais eu le temps de trouver la
réponse car il s'est toujours passé quelque chose...
Alors je continue !
Je continue... Cependant, j'essaie de mettre un peu d'ordre
dans ma pléthore ! Ainsi, sur l'insistance du dédicataire
de cet ouvrage, j'ai effectué le tri de ce que je pense
avoir écrit de meilleur. A l'occasion, je prends la décision
d'arrêter de m'exprimer à travers des petits textes
et des chansons car, au moins sur le plan formel, je pense en
avoir fait le tour. Puis n'y a-t-il pas la poésie, la musique,
la chanson des autres qui accompagnent chaque instant de ma vie
? Mon inspiration y butine bonne part du pollen nourricier...
Je remercie d'avance le lecteur pour son indulgence ! Et j'espère le retrouver au détour d'un roman, d'un film ou que sais-je encore ?
Paris, le
31 juillet 1993
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