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Le carnet
de campagne relate en vingt pages la vie du jeune chasseur à
cheval Charles Guilbert, engagé volontaire, de 1914 à
1917 (en fait, jusqu'en mai 1918). Mais pourquoi le récit
s'arrête-t-il si brutalement ? Nous perdons la trace du
chasseur Charles Guilbert le 27 mai 1918, alors qu'il quitte Lachelle
pour une permission de dix jours.
Pourquoi n'a-t-il pas poursuivi la narration ? La suite
était-elle si évidente (la victoire, la démobilisation
et le retour à la vie civile) qu'il n'ait pas jugé
utile de l'écrire ?
J'en déduis - mais peut-être à tort
- qu'il n'avait pas la fibre littéraire et que seule l'avait
intéressé la relation des faits historiques. La
fibre littéraire, c'est moi qui en ai écopé
grand-père. Et il me passe par la tête que je pourrais
reprendre ta plume afin de poursuivre cette histoire suspendue
sans explication de ta part...
Une autre question s'impose à
moi. Pourquoi mon grand-père a-t-il écrit ce carnet,
extrêmement précis, détaillé ? La fin
d'ailleurs n'est plus qu'une sorte de tableau de bord, une liste
qui, à mon sens, n'offre d'intérêt qu'à
des yeux savants.
Au début, j'ai pensé que la rédaction
au jour le jour de ce carnet l'avait aidé à traverser
la guerre. L'examen du carnet montre d'emblée que ce n'est
pas une bonne hypothèse. Il a en effet été
rédigé d'une traite (en deux ou trois fois peut-être
comme le suggère le changement d'encre, noire puis violette
puis noire), sans doute lors d'un moment d'oisiveté qui
pourrait se situer par exemple dans l'attente de la démobilisation,
laquelle a pu surprendre Charles Guilbert dans la rédaction
du carnet, ce qui expliquerait qu'il s'arrête d'un seul
coup (comme si le chasseur Guilbert avait été interrompu
dans son travail) et qu'il ne comporte pas d'épilogue.
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