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Ce qui reste de mon régiment est encerclé
par les Allemands à quelques kilomètres d'Avalon
(Côte d'Or) où je suis fait prisonnier, le 20 juin
1940. Peu avant, nos officiers nous disent qu'ils ont pris contact
avec l'ennemi, que nous sommes encerclés, qu'il faut nous
rendre sans détruire l'armement. Nous désobéissons
à nos officiers et nous détruisons les armes, munitions,
véhicules, livrets militaires et tout ce qui pouvait rester
aux mains des Allemands. Nous ne sommes pas informés de
l'Appel du Général de Gaulle, le 18 juin. J'en prendrai
connaissance un mois plus tard, par le bouche à oreille.
Par contre, nous sommes informés de la signature de l'Armistice
du 22 juin. Par ailleurs, des bruits courent (des "bruits
de bouteillon" comme nous disions dans notre jargon militaire)
que nous allons être libérés, que nous allons
faire la moisson... Nous sommes remplis d'espoir.
Les Allemands forment des camps de prisonniers de guerre
et nous sommes parqués pendant le mois de juillet au Camp
de Mailly (Aube). Là, nous crevons littéralement
de faim. Nous sommes envahis par la vermine car nous n'avons rien
pour faire un peu de toilette. Ceux qui n'ont pas de dysenterie
(dont je fais partie) ne vont aux toilettes qu'une fois par semaine
!
Les Allemands nous envoient dans la Somme pour faire
les moissons. Une fois qu'elles sont achevées, des bruits
de couloir parlent de départ pour l'Allemagne. Un beau
matin, l'ennemi procède à un appel général.
Je me cache dans le foin avec un camarade. A l'appel, il manque
deux "P.G." (Prisonnier de Guerre). L'officier allemand
menace de faire piquer le foin avec des baïonnettes si nous
ne rendons pas. Nous restons immobiles. Les Allemands commencent
à piquer. Pris de trouille, nous finissons par nous rendre.
Nous avons de la chance car l'officier ne prend aucune sanction
contre nous.
La rumeur était fondée... C'est le départ
pour l'Allemagne, le 1er septembre...
* *
*
Je
complète le récit de mon père qui a omis un épisode. En effet, après
les moissons, les prisonniers de guerre furent incarcérés au Fronstalag
de Péronne (dans la Somme) où il séjourna environ un mois avant le
transfèrement au Stalag XI A du 1er août.
Voici l'extrait du registre qui me permet de renseigner ce point :
Extrait du registre n° 54 (Paris, 18 décembre 1940).
Liste officielle n° 54 de prisonniers français
d'après les renseignements fournis par l'Autorité militaire allemande.
Centre National d'Information sur les prisonniers de guerre.
On
remarquera que le patronyme de mon père a été bien écorché : Pognant
est devenu Pognau ! Quant au grade de capitaine ("cap"), c'est une
erreur. "204" est le code du Frontstalag de Péronne dans la Somme.