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Amimo (extrait)

Une pensée pour Pedro

 

texte envoyé au quotidien Libération
qui, à ma connaissance, ne l'a pas publié

 

Il y a longtemps (bien longtemps !), vous aviez publié un de mes "poèmes": "Au nom des droits de l'homme". Si des années après je reviens vers vous avec mes mots, c'est à nouveau mû par l'urgence et par le besoin d'agir.
Aujourd'hui, il s'agit de Pedro, mon pote le gitan. Il avait quitté son midi natal pour venir chanter à Paris. Non pas dans sa seconde langue maternelle, l'espagnol, non pas la musique des siens, le flamenco. Non. Pedro Fernandez avait choisi ce qu'il y a de plus beau et de plus rare dans notre répertoire (Brel, Ferré, Fanon..., mais aussi des auteurs moins connus qui ont écrit pour lui). Le show-biz n'a pas voulu de son talent. Aussi chantait-il dans des cabarets (Les trottoirs de Buenos-Aires, Le Tourtour...) et faisait-il quelques rares télés (aussi agaçant soyez-vous, merci Monsieur Sevran !). Vie de galère que Pedro supportait car rien ne le rendait plus heureux que de chanter devant un public !
Il y a quelques mois, Pedro a annoncé ses adieux à la scène. J'ai cru qu'il nous faisait un plan de star. En fait, Pedro, gravement malade, était exténué. Il a décidé de faire sa révérence à Paris et à tous ses amis. Pour tout bagage, sa quarantaine sous le bras et son virus dans les veines, il est reparti dans son midi natal afin de se retremper dans ses origines gitanes. Il s'est installé dans une caravane, tout près de la Camargue et de ses Saintes-Maries plus marries que la vraie en face de la misère, de l'injustice et de la souffrance. Il n'était pas préparé à cette solitude et je sais qu'il a souvent le blues.
Aussi, si je n'ai pas la vanité de croire que ça le guérira, je suis sûr que chaque lecteur qui lira le texte ci-dessous pensera à Pedro, et que toutes ces pensées chaleureuses, il les recevra, portées par de grands oiseaux blancs dans l'azur du ciel méditerranéen qui baigne son beau regard noir, et que ça lui fera beaucoup de bien. Pas vrai Pedro ? Hombre !

 

La chanson de Pedro

Les racines des gitans sont des roues de roulotte
ell's les conduis'nt au hasard de chemins qui cahotent
ta roulott' s'est arrimée au soleil de Camargue
comme une fleur accrochée à la bouche du Rhône

te voilà donc en vacanc's dans le golfe du Lion
celui dont tu bouffes juste avant d'entrer en scène
te voilà donc en vacanc's de Paris de la Seine
qui n'a pas de delta mais possède aussi des lions

taille mince, je veux encore
te voir danser sur des rythmes brûlés
mèche folle, je veux encore
te mettre en scèn' dans mes films ébauchés
belle voix, je veux encore
entendre tes chants de fraternité
mains agiles, je veux encore
de tes castagnettes ensoleillées

"Si d'a...ventures..." dit le chanteur
"Si d'a... la merde!" répond le choeur
des voix de sopranos, des voix d'enfants
des voix pures comme un vol de flamants

nous sommes tous purs et nous sommes tous des enfants
NOUS SOMMES TOUS PURS ET NOUS SOMMES TOUS DES ENFANTS !

"Si d'a...ventures..." dit le chanteur
"Si d'a... la merde!" répond le choeur
des voix de sopranos, voix innocentes
qui ne comprennent pas ce qu'elles chantent

nous sommes tous des enfants qui ne comprenons pas
NOUS SOMMES TOUS DES ENFANTS QUI NE COMPRENONS PAS !

 

(1993)

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Pedro a pris définitivement la tangente, quelques semaines après avoir reçu ce texte qui l'a beaucoup touché, m'a-t-il écrit. Je pense souvent à lui. Nous avions des projets artistiques ensemble. Peut-être les réaliserons-nous, dans un autre monde ?

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