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Le Passant souriant

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EXTRAIT : PRELUDE (4/4)

 

  Prélude (suite et fin)

 

  "Comme tout comédien, je peux affirmer que ma voix est toute ma vie. Une vie forcément grouillante de mots. D'ailleurs, je suis devenu un vocabulaire regorgeant de mots. Des mots sots de sucre trempés dans l'absinthe de Rimbaud. Des mots joints roulés dans des feuilles cannabistiques. Des mots dits à tout jamais, comme des parias chutent après l'anal thème. Des mots définitifs comme des coups de canif dans l'obésité du doute. Des mots de minuit, rouges d'excitation. Des mots mis sur leur trente et un quand il faut y mettre les formes. Puis des bons mots, des beaux mots, des petits mots, des gros mots, des grands mots sans les grands remèdes, des mots et merveilles, des mots exquis sans modestie, des mots d'ordre à désobéir, des mots d'elle dont un seul aurait suffi, enfin des mots de tête ou mots d'auteur, c'est pareil. Des mots. Du matin jusques au soir. Des mots comme on respire. Parce que les mots sont la nourriture de la voix, sa musique, sa pulsion, sa partition. Comme le silence est sa respiration.
  "On peut me crever les yeux, m'arracher les membres et, au diable l'avarice, faire main basse sur mes bijoux de famille, on peut m'humilier, me huer, me mépriser, mais que jamais personne ne s'avise de toucher à ma voix !
  "Un soir d'infortune, je croise un quidam. J'ai soif. Je l'apostrophe.
     - Si tu me paies un verre, je te raconterai une histoire.
      "Sans paraître surpris, l'homme me rétorque :
    - Je te paie un verre, mon frère, mais je ne souhaite que ta présence et ton silence, surtout ton silence.
  "Je l'ai vendu pour un verre. J'avais trop soif. Et ce faisant, stupidement, j'ai permis qu'on achetât le silence. Mais quand je l'ai compris, le mal était fait. J'ai donc ajouté le silence à mon répertoire. Il y a un public pour cela. Tenez !

(…)

  - Si vous souhaitez que je poursuive cette interprétation du silence, il faudra payer un petit supplément car cela n'est pas prévu au programme. Et vous le savez, le silence n'est pas gratuit. Je vais donc passer parmi vous. Ni chèques ni cartes de crédit. Aux espèces sonores et trébuchantes qui tombent des poches trouées, la maison préfère les espèces que l'on froisse délicieusement aux oreilles s'ébrouant alors comme des queues de paon.
  "Puisque vous ne semblez pas appréciez mon talent dans le silence, j'annonce la fin du prélude. Que le spectacle commence !

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